Le droit de grève est un droit constitutionnel. C'est-à-dire que cela fait partie des droits les plus fondamentaux de notre société.
La grève a pour objectif de ralentir voir stopper la production (de service, industrielle...). Elle met en lumière le rôle primordial des travailleurs par rapport aux propriétaires des outils de travail.
Elle est définie juridiquement comme la cessation concertée et collective du travail dans le but d’appuyer des revendications professionnelles.
Le fait de déposer un préavis de grève, quelle que soit son ampleur, oblige les dirigeants (directeur de l'hôpital localement, ou ministère de la Santé au national) à ouvrir des négociations. Le suivi de cette grève et le nombre de personnes mobilisées déterminent le poids des organisations syndicales dans les négociations.
La fonction publique hospitalière est un service public soumis à une continuité de service. Cette obligation rentre en confrontation directe avec le droit de grève. Comment cesser le travail si on a obligation de le faire ?
Les législateurs ont prévu un équilibre entre ce droit et nos devoirs. Les directeurs des établissements, après concertation des représentants du personnel, doivent déterminer, service par service, l'effectif minimum nécessaire a assurer le service minimum de l'hôpital.
Pour garantir cette continuité, la direction a le pouvoir d'assigner les agents grévistes indispensables.
Pour être légale, la grève doit remplir certains critères :
Un agent ou un groupe d'agents ne peut pas faire grève de sa propre initiative.
Certaines formes de cessations du travail sont considérées comme illégales :
Contrairement à d'autres fonctions publiques (éducation par exemple) les agents de la Fonction Publique Hospitalière n'ont pas l'obligation de se déclarer grévistes à l'avance. La déclaration se fait le jour même.
Cependant, l'employeur peut demander l'intention de faire grève jusqu'à 48h à l'avance afin d'organiser la continuité. Déclarer l'intention n'engage à rien, le jour de la grève, vous pouvez confirmer votre intention et être réellement gréviste ou changer d'avis et travailler comme initialement prévu.
La grève est un moyen d'action, sa finalité est la négociation avec les décideurs dans le but de porter nos revendications.
Ces revendications peuvent être nationales comme la revalorisation des grilles salariales, une réforme sur les modes de financement de l'hôpital public, un changement radical sur la gouvernance, la lutte contre l'ordre infirmier…
Ou locales, comme récemment la lutte contre les mesures PSIP (voir à ce sujet nos articles).
La grève, les manifestations, les pétitions et tous ces moyens d'action ont pour but de faire peser dans le débat public et dans les négociations l'avis des premiers concernés.
La CGT tant au niveau local du CHMS, au niveau départemental ou au niveau national est représentative. C'est-à-dire que suffisamment d'agents ont voté lors des élections professionnelles pour identifier la CGT comme légitime pour porter leur voix et leurs revendications.
L'ampleur de la grève démontre le soutien des agents vis-à-vis des revendications. Elle donne un poids indispensable à la CGT pour peser dans les négociations.
Le directeur de chaque établissement doit construire et soumettre à la concertation des tableaux d'assignations.
Secteur par secteur, au plus près des activités, le directeur doit déterminer quel effectif est indispensable au maintien de l'activité minimum.
On voit ici toute la dérive des activités hospitalières : des années d'austérité et de recherche de "l'efficience" ont réduit à peau de chagrin le nombre d'agents. Aujourd'hui, l'hôpital est en permanence au plus restreint de son activité, chaque agent étant indispensable au minimum de l'activité. Il n'y a aucune marge de manœuvre.
Le directeur doit donc résoudre une équation impossible : pointer des secteurs et/ou des postes qui pourraient être suspendus durant la grève tout en garantissant un service minimum à la population. Mais l'hôpital a déjà du mal à assurer ce service minimum, on le constate dans les délais de consultation, dans la difficulté dans la prise en soins des chirurgies, dans les retards de la facturation des secrétariats… Il faudrait dans ce cas assigner tout l'hôpital, mais alors, le droit constitutionnel de grève ne serait pas respecté.
L'assignation est le dispositif qui permet à la direction de l'hôpital de contraindre les agents en grève à assurer leur poste.
Il ne faut pas confondre avec la réquisition qui est toujours une décision du préfet dans des conditions très particulières.
Le service minimum en cas de grève doit être assuré en recourant aux personnels non-grévistes, sans recourir à l’assignation en première intention.
Pour citer la FAQ du gouvernement, "L’assignation est une décision individuelle faisant grief, donc susceptible de recours pour excès de pouvoir. Sa notification doit donc être certaine : elle peut être effectuée par remise en mains propres avec signature, par lettre recommandée avec accusé de réception, par convocation pendant leurs obligations de service hospitalières, ou par tout autre moyen assurant sa réception par l’intéressé. Pour des agents absents avant le jour de grève, certains établissements leur remettent parfois leur assignation par voie d’huissier."
Donc l'assignation peut être signifiée avant le jour de grève… mais le directeur ne peut assigner que les grévistes ! Il faut la comprendre dans ce cas comme une mise en garde "si vous vous déclarez gréviste le jour J, vous ferez partie des personnels assignés".
Le jour de la grève, si vous êtes assigné, vous devez travailler et remplir l'intégralité des missions qui sont prévues pour le poste. Refuser une assignation ou ne pas se présenter à son poste alors qu'on est assigné constitue une faute qui peut être sanctionnée. La CGT milite pour des organisations particulières pour le jour de la grève du type organisation "adaptée" (ce que l'on appelait avant "dégradé"). Moins de personnels devrait signifier une adaptation des activités.
Trois cas de figures :
Le calcul de la retenue sur votre rémunération est strictement proportionnel au temps de cessation du travail. On calcule en multipliant par une fraction du revenu mensuel. Sur le CHMS le tableau suivant s'applique.
| Durée de la grève | Retenues |
| 10 Minutes | 0.17/210ème |
| 15 Minutes | 0.25/210ème |
| 30 Minutes | 0.5/210ème |
| 1 Heure | 1/210ème |
| 2 Heures | 2/210ème |
| 4 Heures | 4/210ème |
| 7 Heures 30 Minutes | 7.5/210ème |
| 8 Heures | 8/210ème |
| 10 Heures | 10/210ème |
| 12 Heures | 12/210ème |
Par Exemple, une attachée d'administration hospitalière 4ᵉ échelon, dont l'indice majoré est 455, à un traitement indiciaire de 2238.60€. Si elle fait une demi-journée de grève (3 h 30) elle aura une retenue de 3.5x2238.60/210= 37€31 sur son salaire.
A noté que le temps de grève, assigné ou non, est considéré comme du travail effectif pour l'avancement de carrière.
Dans la fonction publique hospitalière, les fonctionnaires sont soumis à un devoir de réserve. Toutefois, en considérant que ces agents n'ont pas un accès libre au droit de grève, il est toléré qu'ils puissent publier leur engagement par un brassard "gréviste", ou par une étiquette ou une affichette si vous êtes en poste.
Il faut tout de même respecter quelques règles : pas d'insulte ni de propos répréhensibles, pas de tract ni déroulé des revendications (si on vous pose la question "pourquoi vous êtes en grève", vous pouvez y répondre). Seuls les gréviste assignés peuvent manifester leur état de grévistes.
Constitution de 1946 alinéa 7 repris dans la constitution de 1958
Code du travail : article L.2512-1 à L.2512-5
Code général de la fonction publique : article L114-1 à L114-10
Instruction DGOS/RH3/DGCS/2017/64 du 24 février 2017 (relatif au décompte des grévistes)
Site gouvernemental des services public (a visé de vulgarisation)